Joel The last of us

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La série The Last of Us, adaptation poignante du jeu vidéo culte, a touché un public bien plus large que celui des fans de survival horror dont moi. À travers ses paysages post-apocalyptiques et ses infectés terrifiants, elle raconte surtout une histoire profondément humaine. Celle d’un homme brisé, Joel, et d’une adolescente, Ellie, qui vont s’attacher l’un à l’autre malgré les pertes, les peurs, les trahisons et la violence.

Mais The Last of Us, c’est aussi une série qui interroge : serions-nous prêts à survivre à un basculement brutal de notre monde ? Peut-on encore faire confiance dans un univers où la survie est la seule priorité ? Et surtout, l’humanité mérite-t-elle d’être sauvée ?

À travers le parcours de Joel, et les choix forts opérés dans l’adaptation, cet article vous propose une réflexion sur nos fragilités humaines et nos limites morales.

Sommes-nous préparés à un changement brutal dans notre vie ?

Lorsque l’épidémie foudroie la planète, Joel perd sa fille. Cette scène d’introduction, à la fois sobre et déchirante, donne immédiatement le ton : plus rien ne sera comme avant. Et pour Joel, rien n’aura jamais plus de sens.

Ce que vit Joel est un deuil absolu, celui qui broie l’être de l’intérieur. Il ne cherche plus à vivre, seulement à survivre. Comme si tout changement brutal — que ce soit une apocalypse ou une tragédie intime — nous forçait à abandonner qui nous étions.

Mais sommes-nous vraiment prêts à affronter l’inattendu ? Cette série rappelle que ce sont moins les infectés que l’effondrement intérieur qui menace. Joel en est le parfait reflet : il tient debout, mais il n’est plus vivant.

Comment survivre quand on n’a plus goût à la vie ?

Joel incarne un homme qui avance par automatisme. Il n’a plus foi en rien, ni en l’avenir, ni en l’humain, encore moins en lui-même. Son quotidien est rythmé par la méfiance, la violence, et le détachement émotionnel. Jusqu’à Ellie.

Cette jeune fille, aussi vive qu’insolente, va lentement fissurer l’armure. Non pas en douceur, mais par nécessité. Elle l’oblige à ressentir à nouveau, à s’attacher, à aimer. Et c’est là que le dilemme émerge : peut-on survivre durablement sans aimer ? Sans espoir, sans lien, sans tendresse ?

The Last of Us nous suggère que non. Que la survie brute ne suffit pas. Et que, paradoxalement, ce sont les sentiments qui redonnent un sens — même dans le chaos.

Peut-on encore faire confiance quand on vit en mode survie ?

Dans l’univers de The Last of Us, la confiance est une denrée rare. Elle est un luxe, parfois une erreur fatale. Les trahisons, les pillages, les groupes armés, les milices — chaque rencontre peut être une menace.

Joel le sait mieux que quiconque : pour survivre, il a dû trahir, tuer, mentir. Il ne fait plus confiance à personne. Son lien avec Ellie naît d’un contrat, pas d’un choix du cœur. Mais ce lien évolue, lentement, au rythme des dangers partagés.

Faire confiance dans un monde en ruine, c’est s’exposer. C’est prendre le risque de perdre encore. Et pourtant, c’est cette prise de risque qui rend Joel plus humain. C’est parce qu’il se laisse peu à peu attendrir, bouleverser, qu’il retrouve une forme d’intégrité.

La série nous confronte alors à cette question : est-il plus sûr de ne faire confiance à personne, ou plus courageux de continuer à croire en l’autre ?

L’humanité vaut-elle la peine d’être sauvée… et de se sacrifier ?

Le final de la saison 1 bouscule profondément : alors qu’Ellie pourrait, peut-être, sauver l’humanité, Joel choisit de la sauver elle. Ce n’est plus un choix logique, c’est un acte d’amour pur. Un acte de désespoir aussi.

L’humanité, dans The Last of Us, est rarement montrée sous son meilleur jour. Trahison, peur, égoïsme, barbarie. Faut-il vraiment tout sacrifier pour un monde qui ne sait plus ce que signifie « vivre ensemble » ?

Joel répond à sa façon : il refuse de perdre une seconde fois. Il choisit l’amour d’un individu plutôt que l’espoir incertain d’un collectif. Ce choix est moralement discutable, mais profondément humain. Et c’est là toute la force de la série : elle ne nous dit jamais quoi penser. Elle nous oblige à nous positionner.

Alors, à cette question — « L’humanité mérite-t-elle d’être sauvée ? » — la série ne répond pas. Elle nous la renvoie, brutale, intime, personnelle.

Pourquoi tuer Joel dans la saison 2 ? Fidélité au jeu ou trahison émotionnelle ?

Le choix de tuer Joel dès les premiers épisodes de la saison 2 a divisé. Certains ont crié à la trahison, d’autres ont salué le courage narratif. En réalité, la série reste fidèle au jeu vidéo, où ce retournement choquant est central.

Mais la violence de cette scène, sa brutalité presque gratuite, dérange. Parce qu’elle met fin trop vite à une figure paternelle devenue pilier émotionnel. Et qu’elle nous laisse, comme Ellie, orphelins d’un repère essentiel.

Était-ce nécessaire ? Narrativement, oui. Car The Last of Us Part II n’est plus l’histoire de Joel. C’est celle d’Ellie, de sa rage, de sa quête de vengeance. Et pour qu’elle ait lieu, il fallait une perte aussi dévastatrice que fondatrice.

Reste cette frustration : celle de ne pas avoir vu Joel évoluer davantage, de le voir disparaître dans un monde où il commençait à peine à redevenir humain. La série respecte le jeu, mais elle force aussi les spectateurs à ressentir profondément l’injustice — comme Ellie. Et peut-être, est-ce là la preuve qu’elle a réussi.

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